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Adieu, ballets, danses et mascarades,
Adieu, beautés dont les vives œillades
Ont de ces lieux banni l'obscurité.

Adieu surtout, belle rebelle fille,
Dont les rigueurs me chassent d'une ville
Où vos douceurs m'avaient tant arrêté.

SONNETS AUX POËTES DE CE TEMPS

Beaux esprits de ce temps, qui ravissez les cœurs
Par des pointes en l'air, des subtiles pensées,
Vos paroles de prose, en bon ordre agencées,

Me font rendre à vos pieds: vous êtes mes vainqueurs.

Car moi, je ne suis plus courtisan des Neuf Sœurs ;
Des faveurs que j'en ai les modes sont passées :
Peut-être toutefois qu'aux âmes bien sensées
Ma rudesse vaut bien vos modernes douceurs.

J'ai quelques mots grossiers, quelques rimes peu riches; Mais jamais grand terroir ne se trouva sans friches: Je vois clocher Virgile, Homère sommeiller.

Chacun fait ce qu'il peut, en vers comme à la danse; Mais, le bal étant long, il faut tant travailler

Que les meilleurs danseurs y sortent de cadence,

J'aime Du Bartas et Ronsard;
Toute censure m'est suspecte,
Quelque raison que l'on m'objecte,
De celui qui fait bande à part.

C'est fort bien d'enrichir son art, Pourvu que trop on ne l'affecte; Mais d'en dresser nouvelle secte, Notre siècle est venu trop tard.

O censeurs des mots et des rimes, Souvent vos ponces et vos limes Otent le beau pour le joli!

En soldat j'en parle et j'en use.
Le bon ressort, non le poli,
Fait le bon rouet d'arquebuse!

CHANSON

Belle, si pour tirer les dames
Au réciproque de nos flammes,
Ce n'est rien de la loyauté
Sans les hameçons d'éloquence,
Que n'ai-je autant de bien-disance
Comme vous avez de beauté!

Ou si votre âme plus subtile,

Jugeant la parole inutile,

Veut voir un amour arrêté

Fidèle en sa persévérance,

Que n'ai-je autant de récompense
Comme j'ai de fidélité!

Ou si votre œil inexorable

Se plaît à voir le misérable
Éternellement tourmenté,

Pour vous complaire en ma souffrance,

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Que n'ai-je autant de patience

Que vous avez de cruauté!

Ou si la rumeur du vulgaire
Vous retient de me satisfaire
En l'amoureuse volupté;
Pour trahir toute médisance,
Ah! que n'ai-je autant de licence
Comme vous d'opportunité!

LES PIEDS 1

C'est à ces pieds poupinement petits
Que je consacre, en dépit de l'envie,
Ma voix, mon luth, mon service et ma vie,
Pieds bien formés comme ceux de Téthis!

Pieds dessous qui les cœurs assujettis
Ne plaignent pas leur franchise asservie !
Bien qu'à mon œil la vue en soit ravie,
Je les adore en leurs étuis gentils.

J'ai vu cent fois leurs voltes arrondies,
Leurs branles gais, leurs justes canaries 2
Rendre en un bal tout le monde étonné.

J'ai vu la fleur, en la plaine émaillée,
Revivre mieux pour en être foulée :

Seul, dessous eux mon espoir est fané!

1 Schelandre, dans une suite de sonnets amoureux, a célébré toutes les beau

tés de sa maîtresse, les yeux, le front, les mains, etc.

Nom d'une danse ancienne.

LE TEINT

On me l'a dit ainsi, (l'aurais-je moi jugé? Tout plaît également au sujet que l'on aime!) Que sa perfection plus rare et plus extrême, C'est un teint de vermeil sur le blanc arrangé.

Vermeil! non qui puisse être au masque déchargé, Lorsqu'un trait de pinceau l'a posé sur le blême; Blanc, non pas de céruse ou d'un artiste chrême, Mais un teint naturel, sagement ménagé..

O siéges de pudeur! pleines douillettes joues, Et toi, menton mignard, exempt de toutes moues, Votre air et votre teint rend mes maux adoucis.

Et quand le ris se lève entre vos trois pommettes, Lors, d'aise tout ravi, dans les trois fosselettes J'enterre pour un temps mes plus âpres soucis.

RACAN

4589 - 1670

La mine d'un fermier, les façons d'un gentillâtre balourd, l'entrain d'un bègue qui grasseyait sitôt qu'il ne bégayait plus, tels sont les traits principaux dont Tallemant a marqué dans nos souvenirs la figure originale d'Honorat de Beuil, chevalier et plus tard marquis de Racan. En France où, sur toutes choses, nous n'hésitons guère qu'entre les diverses formes du convenu, il n'y a pour réussir et pour durer que les images héroïques ou les caricatures il nous faut des demi-dieux ou des magots. Cette fois, la caricature a prévalu, et si d'aventure le nom de Racan se prononce encore, pour le gros du monde il rappelle surtout quelques grotesques anecdotes; il fait songer par exemple à la mystification que subirent à la fois la très-docte, très-excellente, trèsvieille mademoiselle de Gournay, la fille adoptive de Montaigne, et le chantre des Bergeries, le jour où la bonne demoiselle qui espérait la visite de Racan vit d'heure en heure son logis envahi par trois cavaliers d'allures différentes, chacun s'intitulant marquis de Racan, chacun phrasant et périphrasant à ravir, si bien que, malgré les doutes qui lui étaient venus dès la seconde visite, la maîtresse du lieu se laissait docilement surprendre au miracle de cette triade de Racans; mais quand enfin survint le Racan véritable, gauche, mal en point, et torturant sa langue pour décliner son nom, elle n'y tint plus, elle se répandit en injures, et de ses propres mains poussa dans l'escalier le bouffon grossier qui la voulait jouer... Où vais-je pourtant, et pourquoi reprendre à mon compte les anas du sottisier d'il y a deux siècles? Ce n'est pas Tallemant qu'il faut interroger sur Racan; c'est La Fontaine, c'est Despréaux, c'est Malherbe, ou plutôt c'est Racan lui-même.

Les illustres avocats de Racan, et je suis loin de les avoir nommés

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