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Vous employez utilement
Ce tems qui fi rapidement
Trompe la jeuneffe volage.

Vous cultivez l'efprit charmant
Que vous a donné la nature;
Les réflexions, la lecture
En font le folide aliment,
Et fon ufage eft fa parure.

S'occuper c'eft favoir jouïr.
L'oifiveté pèfe & tourmente.
L'ame eft un feu qu'il faut nourrir,
Et qui s'éteint s'il ne s'augmente.

EPITRE

CONNUE SOUS LE NOM

DES VOUS ET DES TU.

P Hilis, qu'est devenu ce tems,

Où dans un fiacre promenée,

Sans laquais, fans ajustemens,
De tes graces feules ornée,
Contente d'un mauvais foupé,
Que tu changeais en ambrofie,
Tu te livrais, dans ta folie,
A l'amant heureux & trompé,
Qui t'avait confacré fa vie?
Le Ciel ne te donnait alors,

Pour tout rang & pour tous tréfors;
Que les agrémens de ton âge,
Un cœur tendre, un efprit volage,
Un fein d'albâtre, & de beaux yeux.
Avec tant d'attraits précieux,
Hélas! qui n'eût été friponne!
Tu le fus, objet gracieux,
Et que l'amour me le pardonne,
Tu fais que je t'en aimais mieux.

Ah, Madame, que votre vie,
D'honneur aujourd'hui fi remplie,
Diffère de ces doux inftans!
Ge large Suiffe à cheveux blancs,

Qui ment fans ceffe à votre porte,
Philis, eft l'image du tems;

Il femble qu'il chaffe l'escorte
Des tendres amours & des ris.
Sous vos magnifiques lambris
Ces enfans tremblent de paraître.
Hélas! je les ai vû jadis
Entrer chez toi par la fenêtre,
Et fe jouer dans ton taudis.

Non, Madame, tous ces tapis

Qu'a tiffus la Savonerie, a
Ceux que les Perfans ont ourdis,
Et toute votre orfévrerie,

Et ces plats fi chers que Germain b
A gravés de fa main divine;
Et ces cabinets où Martin c
A furpaffé l'art de la Chine;
Vos vafes Japonnois & blancs,
Toutes ces fragiles merveilles;
Ces deux luftres de diamans
Qui pendent à vos deux oreilles ;
Ces riches carcans, ces colliers,
Et cette pompe enchantereffe,
Ne valent pas un des baifers
Que tu donnais dans ta jeuneffe.

a La Savonerie eft une belle manufacture de tapis établie par le grand Golbert.

LETTRE

b Germain excellent orfèvre dont il eft parlé dans le Mondair.

Martin, excellent verniffeu:

LETTRE

A MONSEIGNEUR

LE CARDINAL DU BOIS. *

U

De Cambray, Juillet 1722.

Ne beauté qu'on nomme Rupelmonde,
Avec qui les amours & moi

Nous courons depuis peu le monde,
Et qui nous donne à tous la loi,

Veut qu'à l'inftant je vous écrive.

Ma Mufe, comme à vous, à lui plaire attentive, Accepte, avec tranfport, un fi charmant emploi.

Nous arrivons, Monfeigneur, dans votre Métropole, où je crois que tous les Ambaffadeurs & tous les cuifiniers de l'Europe fe font donné rendez-vous. Il femble que les Miniftres d'Allemagne ne foient à Cambray que pour faire boire la fanté de l'Empereur. Pour Meffieurs les Ambaffadeurs d'Efpagne, l'un entend deux Meffes par jour, l'autre dirige la troupe des Comédiens. Les Miniftres Anglais envoyent beaucoup de couriers en Champagne,

*Cette lettre eft de 1722. On l'a imprimée plufieurs fois, mais on la donne ici fur l'original. Madame de Rupelmonde

L 3

était fille du Maréchal d'Alègre, mariée à un Seigneur Flamand, & mère du Marquis de Rupelmonde tué en Bavière.

pagne, & peu à Londres. Au refte, perfonne n'attend ici Votre Eminence: on ne pense pas que vous quittiez le Palais-Royal pour venir vifiter vos ouailles. Vous feriez trop fâché, & nous auffi, s'il vous fallait quitter le Miniftère pour l'Apostolat.

Je

Puiffent Meffieurs du Congrès,

En buvant dans cet afyle,
De l'Europe affûrer la paix!
Puiffiez-vous aimer votre ville,
Seigneur, & n'y venir jamais!

fai que vous pouvez faire des homélies,

Marcher avec un porte-croix,

Entonner la Meffe par- fois,

Et marmoter des litanies.

Donnez, donnez plutôt des exemples aux Rois;
Uniffez à jamais l'efprit à la prudence;
Qu'on publie en tous lieux vos grandes actions:
Faites-vous bénir de la France,

Sans donner à Cambray des bénédictions.

Souvenez-vous quelquefois, Monfeigneur, d'un homme, qui n'a en vérité d'autre regret que de ne pouvoir pas entretenir Votre Eminence auffi fouvent qu'il le voudrait, & qui de toutes les graces que vous pouvez lui faire, regarde l'honneur de votre converfation comme la plus flateufe.

LETTRE

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