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Houlette ni chien,

Il ne me rend rien.

Puissiez-vous, contentes,

Et sans mon secours

Passer d'heureux jours,

Brebis innocentes,

Brebis, mes amours!
Que Pan vous défende!
Hélas! il le sait;
Je ne lui demande
Que ce seul bienfait.
Oui, brebis chéries,
Qu'avec tant de soin
J'ai toujours nourries,
Je prends à témoin
Ces bois, ces prairies,
Que si les faveurs

Du dieu des pasteurs
Vous gardent d'outrages,

Et vous font avoir,

Du matin au soir,

De gras pâturages;
J'en conserverai,
Tant que je vivrai,
La douce mémoire;
Et que mes chansons,

En mille façons,

· Porteront sa gloire

Du rivage heureux
Où, vif et pompeux,
L'astre qui mesure
Les nuits et les jours,

Commençant son cours,
Rend à la nature

Toute sa parure;
Jusqu'en ces climats

Où, sans doute las
D'éclairer le monde,
Il va, chez Téthys,
Rallumer dans l'onde
Ses feux amortis.

A UNE JEUNE FEMME

TROP FIÈRE DE SA BEAUTÉ

Tant qu'on est belle, Iris, il est vrai qu'on fait naître
Des désirs, des transports et des soins assidus;
Mais on a peu de temps à l'être,

Et longtemps à ne l'être plus.

RACINE

1639-4699

Le génie dramatique de Racine est désormais à l'abri de toute discussion. Personne, à l'avenir, ne touchera plus qu'en les révérant à des œuvres élevées et pures, délicates et tendres, profondes, passionnées, idéales, comme Britannicus et Andromaque, Iphigénie, Phèdre, Mithridate, Bérénice, Esther et Athalie. Aux yeux de qui sait lire les poëtes, c'est-à-dire les sentir et les juger, la douceur, la pureté, la tendresse, ne sont si admirables chez le glorieux disciple de PortRoyal que parce qu'elles accompagnent la grandeur, l'étendue, la force; divine harmonie qui se résume en deux mots, la majesté gracieuse! Ceux qui ont tant persifflé jadis les Achille et les Hippolyte doivent reconnaître maintenant que leurs amoureux sataniques et leurs capitans ravagés ne sont guère plus vivants que les langoureux subtils de la tragédie classique. Théramène lui-même, ce confident si honni par de naïfs parodistes, nous semble aujourd'hui moins suranné que ces confidents masqués du drame moderne qu'on pourrait baptiser tous ensemble d'un même mot générique : Therameno Therameni. Les ignorants seuls peuvent contester encore la souple richesse d'une versification harmonieuse qui ne manque jamais, quand il le faut, de césures imprévues, d'enjambements heureux, ni d'énergiques rejets, ni de frappants contrastes. Au centre du XVIIe siècle, et tout à fait au bout d'une des plus vastes perspectives de l'histoire littéraire, le monument immortel du poëte s'élève lumineux et triomphant. Si, comme toutes les œuvres humaines, il s'est dépouillé en vieillissant des beautés factices qui le décoraient dans sa nouveauté, il n'a du moins rien perdu de sa noble ordonnance, de son ensemble magnifique, de son caractère

historique et personnel. Le grand Racine vaut définitivement le grand Corneille, comme le grand Turenne vaut le grand Condé.

Né à La Ferté-Milon, dans une famille anoblie qui avait un cygne dans ses armes, Jean Racine quitta de bonne heure le foyer paternel. Dès qu'il sentit frissonner ses ailes, le jeune cygne s'envola vers Paris. Il était fait pour se mirer dans les belles eaux de Port-Royal-des-Champs, pour se baigner à l'ombre des blanches statues dans les grands bassins de Versailles, pour visiter les rives tranquilles de l'Ilissus et du Tibre, pour soupirer enfin son chant suprême au-dessus des cimes sacrées de la Palestine, parmi les colombes de Sion.

Les débuts du poëte furent modestes. Élevé à l'école des Granges par de pieux et savants jansénistes, il consacra ses premiers vers à la description de leur illustre retraite. Un sentiment lyrique, plein de naïveté enfantine, anime doucement le Paysage de Port-Royal, composé de sept odes dont voici les titres Louange de Port-Royal en général; le Paysage en gros; Description des bois; l'Étang; les Prairies; des Troupeaux et d'un Combat de taureaux; les Jardins. Les graves impressions de cet esprit religieux, aussi bien que les mouvements de surprise, de curiosité, de sensibilité, la floraison même de cette âme toute neuve, durent consoler et réjouir les solitaires attristés de la vallée de Chevreuse. Sous le regard de ses maîtres, Racine, touché de leurs vertus, célébrait avec candeur la sainteté de leur sanctuaire :

Je vois ce cloître vénérable,

Ces beaux lieux du Ciel bien-aimés,

Qui de cent temples animés
Cachent la richesse adorable.

C'est dans ce chaste paradis

Que, règne en un trône de lis,
La virginité sainte :

C'est là que mille anges mortels,

D'une éternelle plainte,

Gémissent au pied des autels.

C'était l'Éliacin de M. Le Maître, c'était le Joas de M. Lancelot, c'était l'enfant de bénédiction de sa tante Agnès de Sainte-Thècle, qui devait succéder un jour à la mère Angélique. Mais le jeune néophyte ne restait pas toujours à l'ombre du cloître; il s'échappait des bras de la religion pour courir les champs en liberté. Toutes les voix de la nature lui parlaient alors ses grands yeux, miroirs intelligents, renvoyaient à son imagination mille tableaux de la vie rustique et pastorale. Il décrivait

avec la fidélité d'une première émotion ce qu'il avait contemplé, entendu, senti, le long des buissons en fleurs, ou sous les voûtes tremblantes des grands bois. Le poëte charmé n'oubliait dans sa verve familière aucun détail pittoresque, ni « l'or mouvant des moissons, »> ni « les javelles blondes, » ni les longues allées de la forêt,

Droites, penchantes, étoilées,...

ni << les grands prés, si beaux et si verts,» ni les jeux aériens de

L'hirondelle voltigeante

Rasant les flots clairs et polis,...

ni les gazouillements des clairs ruisseaux,

C'est là qu'en paisibles replis

Dans les beaux vases de leurs lits,

Ils arrosent les herbes,...

ni les aiguillons enflammés de cette chaleur violente

Qui dans les champs et les vallons

Brûle les avides sillons,...

ni les fraîches haleines des zéphyrs qui viennent, au soleil couchant,

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Abeilles et papillons se poursuivaient dans son esprit, comme dans les splendeurs du soir:

Là l'on voit aussi sur les herbes
Voltiger ces vivantes fleurs,
Les papillons, dont les couleurs
Sont si frêles et si superbes :
C'est là qu'en escadrons divers,
Ils répandent dedans les airs

Mille beautés nouvelles,

Et que les essaims abusés

Vont chercher sous leurs ailes

Les pleurs que l'Aurore a versés.

Même en fermant les yeux, il aurait vu passer la biche haletante, et

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