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LA FLÈCHE EN 1789

Qui donc ignore l'enthousiasme qui s'empara des esprits lors de la convocation des Etats Généraux? En Anjou, les trois ordres, y compris la noblesse, furent unanimes dans leurs sentiments de reconnaissance et de joie envers le roi Louis XVI. On sait qu'après la réunion des Etats, le clergé offrit 400.000.000 pour subvenir aux besoins de l'Etat. Un Père Récollet de La Flèche, le P. Piquet, n'avait pas attendu cette époque pour faire ses offres au gouvernement. Voici la lettre qu'il écrivit au garde des sceaux Barentin, à la date du 18 mars 1789 (1):

Sa Majesté ayant annoncé qu'elle désirait toute espèce de renseignements sur la tenue des derniers Etats Généraux, cette invitation est pour moi un ordre précis de vous présenter ce que j'ai de relatif à cet objet. C'est un petit ouvrage en quatre volumes, intitulé Cabinet d'Henri IV; le dernier contient les noms, surnoms et qualités des députés aux Etats de 1614. J'en ai fait part à M. du Can, maire de La Flèche. Si vous m'honorez d'une réponse, je vous ferai passer cet ouvrage au premier ordinaire qui la suivra.

Nous voilà enfin arrivés à cette mémorable rérolution, qui, en préconisant la belle âme de notre monarque bienfaisant, met sur le chandelier les lumières du digne ministre que la France adore. Dans cette crise de l'Etat, chaque citoyen français devrait se saigner jusqu'à l'eau rousse pour en relever la dignité et en soutenir l'éclat.

Vous pressentez qu'un religieux à besace ne saurait guère s'élever au-dessus de la sphère des désirs.

(1) La lettre du religieux fut marquée du sceau du maire de La Flèche avant d'être envoyée à Versailles. Archives Nationales, B III 7.

Cependant, du fruit de mes faibles talents de prédicateur, après avoir donné au monastère ce qui lui était acquis, il me reste la somme de 200 livres, que je réservais pour mes dernières années. Je m'estimerais mille fois heureux si vous daigniez les accepter dans cet instant où la finance est si dérangée. J'avoue que cette somme est bien modique, mais enfin c'est tout mon avoir. Ce denier de la veuve est le témoignage le plus pur de ma bonne volonté. Je voudrais que ce fut autant de cent mille livres je les verserais dans la caisse royale d'un aussi grand cœur que je répandrais mon sang pour la conservation de notre bon roi et votre prospérité.

Si je ne puis dans ce bas monde qu'admirer vos vertus, j'espère fermement que dans l'autre je les verrai couronner par le juste appréciateur du mérite, celui qui a divers appartements pour les vertueux et qui avec ce titre ne fait acception de personne. Ce sont les vœux que forme pour vous celui qui a l'honneur d'être, etc.

Le 28 mars, Barentin répondit au religieux fléchois :

J'ai reçu avec grand plaisir la lettre que vous avez pris la peine de m'écrire. Elle est digne d'un bon citoyen et d'un bon serviteur du Roi. L'offre que vous faites de vos épargnes, ne sera point acceptée. Un homme qui pense comme vous doit en faire un excellent usage. Mais je verrai très volontiers l'ouvrage intitulé Cabinet d'Henri IV, et je vous invite à me l'envoyer. Je ne veux pas manquer de vous parler de ma reconnaissance pour les sentiments que vous témoignez à mon égard et je me félicite de vous les avoir inspirés.

La correspondance du religieux et du ministre ne méritet-elle pas d'être tirée de l'oubli? Elle a sa place marquée dans les Annales Fléchoises.

F. UZUREAU,

Directeur de l'Anjou Historique,

NOYEN. LE COLLÈGE

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Sous ce titre de Collège nous ne voulons pas parler de l'école primaire, si remarquable soit-elle, où se dispense l'instruction primaire aux enfants, en l'an de grâce 1903.

Noyen, aux époques de fanatisme, d'obscurantisme, possédait un Collège où l'on enseignait à nos pauvres aïeux, si profondément méprisés par la génération savante d'aujourd'hui, les éléments des sciences humaines. Aux privilégiés de l'intelligence on montrait les belles-lettres anciennes et nous verrons que maîtres et élèves eurent parfois d'éclatants succès. A tous on inculquait de solides principes religieux qui faisaient, d'hommes instruits, des chrétiens éclairés.

J'aimerais voir en présence l'un de ces ignorants du passé et l'un des plus beaux fruits de l'éducation actuelle. Il n'est guère difficile de deviner à qui il faudrait retourner l'épithète, si sottement appliquée parfois à nos ancêtres.

Le collège de notre petite ville fut, dans sa création, sa fondation, sa vie entière, l'œuvre du Clergé de l'époque. Il n'y avait point alors de budget coûteux de l'instruction publique. Les dons généreux de prêtres intelligents et zélés, à qui l'instruction des enfants semblait un devoir d'état, entretenaient l'établissement.

Il faut être d'une insigne mauvaise foi ou d'une ignorance complète en histoire pour prétendre que l'instruction date de la Révolution française. Que, depuis ce temps, des progrès aient été faits; qu'on ait pris dans les classes les plus basses un plus grand

souci du travail intellectuel; que, depuis 30 ans, on ait innové de meilleures méthodes; qu'on ait surtout perfectionné le matériel, et créé des palais scolaires... nous le croyons; il n'est pas nécessaire, quand on recherche le passé, d'en devenir fanatique et de vouloir à tout prix le rendre plus parfait qu'il n'était.

Mais nous affirmons, en particulier pour la Sarthe, que plus de la moitié des paroisses (1) étaient pourvues d'écoles ou de collèges de garçons et de filles. Et nous avons la preuve, pour Noyen, que l'ignorance y était assez rare imbu nous-même de fausses idées sur ce point, c'est avec surprise que nous avons vu quelle place tenait l'instruction dans notre paroisse ; de nombreux détails nous ont prouvé qu'elle était répandue dans toutes les classes de la société : c'est ainsi que dans les nombreux registres conservés à la mairie, dans les minutes des actes notariés, il y a fort peu d'actes qui ne soient signés des intéressés. Dans des localités, pourtant peu importantes, voisines de Noyen, il en était de même. Pirmil et Parcé possédaient leur petit collège.

Donc, autrefois, ignorance relative parce que civilisation moins avancée; mais à ceux qui viendraient m'objecter l'esprit arriéré, la pauvreté d'intelligence de mes aïeux, je répondrais: Medice cura teipsum !!

I

Il faut sans doute voir deux phases dans l'existence du Collège de Noyen; car nous avons, d'un côté, un acte de fondation de ce collège en 1593, et, par ailleurs, la vie de René Flacé, que nous raconterons, nous le montre avant cette époque enseignant les belles-lettres chez nos compatriotes. On peut donc supposer, qu'avant 1593, l'établissement n'était pas encore

(1) Armand Bellée. Recherches sur l'instruction dans la Sarthe avant la Révolution.

organisé sur des bases solides et définitives, et, qu'à cette époque, il fut établi de telle façon qu'on pùt ́ parler d'une vraie fondation.

C'est en effet, le 19 mars 1593, que Réverend Père en Dieu, François Rabeau, prêtre, abbé commendataire de Saint-Calais, étant en la maison seigneuriale de Belle-Fille à Chemiré-le-Gaudin, fit son testament qui contenait la clause suivante (1):

... « Item a donné et laissé une fois payée la somme de 1000 escus pour être mise et employée à la fondation et dotation d'un collaige en la ville de Noyen pour en instruire et enseigner les jeunes enfants; duquel collaige ses proches parents seront présentateurs et nommeront un maître au curé de SaintGermain de Noyen, lequel sera tenu admettre celui qui lui sera présenté moyennant qu'il soit capable. Et au cas que sesdits parents fussent négligents de faire ladite présentation veult et ordonne que ledit curé et ses successeurs présentent et reçoivent ledit maître. » François Rabeau était né à Noyen.

Il faisait partie de cette élite de prêtres qui honoraient le diocèse par leur science et leur vertu, sous l'inspiration de brillants évêques tels que René du Bellay, Charles et Claude d'Angennes. Le Maine et l'Anjou fourmillent alors d'hommes remarquables tant dans la cléricature que dans le siècle : les de Baïf, Ronsard, Belon, J. Pelletier, etc., parmi lesquels notre compatriote René Flacé tenait un rang honorable, comme nous le verrons.

II

René Flacé professa à Noyen, avant la fondation du collège par François Rabeau. Depuis cette époque, divers supérieurs se succédèrent dont nous avons retrouvé les noms. D'après une disposition du testa

(1) Archives de la Sarthe, D. 34.

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