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Pour moi, près d'un foyer étincelant de braise,
Je tâche à composer une œuvre qui te plaise;
C'est ce qu'à mes travaux je propose de prix :
Mais aussi quelquefois ma fidèle mémoire
Fait céder tout penser de gloire

Au doux penser de mon Iris.

Elle occupe en mon cœur toujours la même place;
Pour toute autre beauté mon cœur est tout de glace;
Mon Iris est toujours ce que j'aime le mieux.
Je me soumets sans peine au joug de cette belle;
Patru, je ne puis aimer qu'elle;

Elle seule plaît à mes yeux.

Malheureux que je suis! pourquoi l'ai-je perdue?
Que fais-je dans ces lieux, éloigné de sa vue,
Que traîner à regret des jours pleins de langueurs?
Qu'un amant est heureux, quelque mal qui le presso,
Quand il meurt pour une maitresse,

Et lui peut dire : je me meurs!

ÉPITRE

A M. CASSANDRE

Cassandre, j'ai lu ton épître;
Car de vouloir nommer regître
Un gentil ouvrage de vers,
C'est parler un peu de travers:
Regître est un mot d'écritoire,
Hai des Filles de Mémoire.
Mais passons. Voudrais-tu savoir
Ce que je fais, matin et soir,
Depuis la fâcheuse journée
Que la perverse destinée

M'a fait voisin de Landreci?

Je ne manque pas de souci:

Toujours je crains pour la Champagne
Les rouges escadrons d'Espagne,
Et m'est avis que les Walons
Sont déjà dessus mes talons;
Mais je jure sainte Brigide,

Si devers nous ils tournent bride,
Que les drôles ne m'auront pas,
Si leurs chevaux ne vont bon pas;
Quelque sot attendrait ces drilles
Plus malfaisants que des chenilles.
Tu vois, par ce vaillant discours,
Que je me ressemble toujours,
Et que mon habit, cher Cassandre,
Ne cache pas un Alexandre.
Chacun a son humeur, dit-on,
La mienne est d'être un peu poltron ;
Cela sied bien aux gens d'église.

Aussi j'ai pris pour ma devise:
Courir bien et partir à point
Sauve le moule du pourpoint.

STANCES

A MADEMOISELLE SERMENT

Chloris, je vous le dis toujours, Ces faiseurs de pièces tragiques, Ces chantres de gens héroïques

Ne chantent pas bien les amours.

De beaux mots leurs œuvres sont pleines,

Ils sont sages comme Catons,

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Pour moi qui hais la muse austère Et la gravité de ses tons,

Je vous ai choisi, ma bergère,
Pour le sujet de mes chansons.

Au doux murmure des fontaines
Je mêlerai des airs si doux

Que les dieux des prés et des plaines Deviendront amoureux de vous.

Mais gardez bien d'être infidèle

A votre fidèle berger;

Car, ma Chloris, pour être belle,
Il n'est pas permis de changer.

ÉPIGRAMME

Ami, je vois beaucoup de bien
Dans le parti qu'on me propose;
Mais toutefois ne pressons rien.
Prendre femme est étrange chose;
Il y faut penser mûrement.
Sages gens, en qui je me fie,
M'ont dit que c'est fait prudemment

Que d'y songer toute sa vie.

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Quel Montreuil? me dit-on. Est-ce Jean de Montreuil, avocat au Parlement, qui fit, en 1606, un poëme de trois cents vers, intitulé le Tombeau de M. Philippe des Portes? Est-ce Bernardin, son second fils, qui écrivit beaucoup d'assez mauvais français sur du grec du Bas-Empire? Est-ce un autre Jean de Montreuil, fils aîné de Bernardin, ou bien est-ce son frère Mathieu? C'est celui-ci, puisqu'il nous faut un poëte. Quant à son frère, le second Jean, dont nous aurons à parler à cause de lui, c'est quelqu'un de l'Académie, comme on disait alors.

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Il était facile de se perdre dans cette confusion des Montreuil. L'abbé d'Artigny qui, avant nous, voulut la débrouiller, faillit ne pas s'y retrouver. « Voilà, dit-il comme soulagé, après avoir laborieusement dressé sa liste, voilà tous les Montreuil que j'ai pu découvrir. On voit qu'il est aisé de s'y tromper et de prendre l'un pour l'autre. »

On ne sait pas au juste en quel endroit ni à quelle époque naquit Mathieu de Montreuil; on pense toutefois que ce fut en Bretagne, vers 4620 2. Il fut abbé, mais seulement pour le bénéfice, ce qui ne l'empêcha pas d'avoir grand équipage 3, de porter fièrement l'épée, de courir les aventures, et surtout de faire l'amour. On trouve une passion à chaque coin de sa vie. Il voyagea beaucoup; or, quelqu'un l'a dit, «il changeoit de maîtresse comme de séjour 5. » Il avait tout ce qu'il faut pour plaire partout : « Une physionomie revenante ; » de belles dents, auxquelles il tenait fort; de l'esprit qu'il gaspillait en pro

1 Nouveau Mémoire d'histoire, de critique et de littérature, 1752, in-8, tom. V, p. 230-233. - 2 Michault, Mélanges historiques et philosophiques, 1754, in-12, t. I, p. 87. 3 Montreuil, OEuvres, p. 25, 82. Id., p. 98-99.- 5 Michault. tom. I, p. 87. — 6 Id., p. 90.

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digue, mais non plus volontiers que son argent, «< car sa volupté étoit d'un gros entretien 1; » un vif désir de plaire et un grand talent pour se faire aimer, ce qui n'est pas, comme il l'a dit 2, « un mauvais signe qu'on est aimable; » puis voltigeant sur tout cela une étourderie de linotte, qui d'avance justifiait ses inconstances, en laissant croire qu'elles n'étaient que les oublis d'un distrait; beaucoup de cœur au fond, et du plus tendre, du plus sensible, ce qui l'eût rendu parfois bien malheureux, si son étourderie à tire-d'aile ne l'eût toujours sauvé. Il lui arrive de se dire triste, mélancolique 3, et il faut le croire. Sa mélancolie ne dura peut-être que le temps qu'il met à en parler, mais, tout ce temps-là du moins, elle est sincère. La meilleure preuve qu'il a vraiment du cœur en amour, c'est qu'il en demande à celles qu'il aime. Plus de bel esprit alors; il en oublie la langue du moment qu'il aime bien, et il supplie qu'on ne la lui parle pas. «Ne vous amusez plus, dit-il par exemple à une femme qui croyait devoir se mettre en de tels frais pour lui, ne vous amusez plus à m'écrire des lettres si belles. Quand elles ne viennent que de votre esprit, elles ne vont point à mon cœur. »

Toute son histoire est dans ses amours. Que fait-il pendant la Fronde? Il aime. Il est pourtant déjà d'âge raisonnable; et il serait bon qu'en raison de son rang, il prit parti pour l'une ou l'autre cause. Ce ne sont point là ses affaires; il veut bien une fois, une seule, parler politique, et s'expliquer sur M. le Prince, qui, par ses façons de rebelle, gâte un peu sa gloire de vainqueur; mais il n'en écrit que quelques lignes à peine. Tout s'arrangera, il l'espère, et il se console ainsi. Sans l'espérance en effet, où en serait-on? « Il faudrait, dit-il 5, songer que nous pourrions manquer de pain. » Ce dernier point qui n'est pas sans importance, est pourtant au fond le moindre souci de Montreuil. Pourvu qu'on l'aime, il passera sur tout, même sur la famine. Ses amours sont à Paris, et les troubles, en occupant la curiosité des importuns, lui laissent, auprès de sa belle, les plus heureux loisirs; il aime donc la guerre civile, et ne craint rien tant que de la voir finir:

Toute la France a beau se plaindre, et désirer
Que la guerre finisse et qu'on quitte les armes.
En l'état misérable où m'ont réduit vos charmes
Il ne faut que cela pour me désespérer.

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Montreuil, OEuvres, p. 138.— 3 Id., p. 11, 103.

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